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ÉCOMUSÉE du PATRIMOINE de MEMRAMCOOK

Panneau d'interprétation de la statue Lefebvre

En collaboration avec la Congrégation de Sainte-Croix et l'Institut de Memramcook

La statue Lefebvre située en avant de l'Institut de Memramcook
Photo prise lors du dévoilement du panneau en 2005
De gauche à droite : Père Daniel Deveau, c.s.c., supérieur du District d'Acadie de la Congrégation de Sainte-Croix; Conrad LeBlanc, conseiller général du Village de Memramcook; Richard «Cy» LeBlanc, député provincial; Anita Boudreau, présidente du comité régional de pastoral; Gérard LeBlanc, président, comité de l'Écomusée; Denise Léger-Collin, présidente de la Société historique.

Texte qui paraît au panneau

Érigée en 1914, lors du 50e anniversaire de la fondation du collège Saint-Joseph, la statue à votre gauche fait honneur à celui qui a oeuvré à Memramcook pendant plus de 30 ans, comme curé de la paroisse Saint-Thomas de Memramcook et comme supérieur du collège Saint-Joseph dont il est le fondateur.

L'aventure de Camille Lefebvre commence bien avant son arrivée à Memramcook. C'est à Saint-Philippe de Laprairie, le 14 février 1841, que naît celui à qui l’Acadie doit l'établissement de la première institution d’éducation supérieure durable en terre acadienne. Suite à une formation initiale reçue dans son milieu natal et les environs, le jeune Camille se dirige en 1852 vers le Collège Saint-Laurent, près de Montréal, institution que dirigent les religieux de Sainte-Croix, congrégation fondée au Mans, en France, par le P. Basile Moreau en 1835. II devient ainsi le premier candidat d'origine canadienne à demander son admission pour être finalement ordonné prêtre dans cette congrégation le 29 juillet 1855.

Tour à tour vicaire à S. Eustache et à Ste Rose, au Québec, dès après son ordination, il est ensuite rappelé au Collège Saint-Laurent pour y enseigner le catéchisme, domaine où se révélera son talent de vrai communicateur. En 1861, on l’assigne au Collège de Saint-Aimé toujours au Québec. Là, il va seconder le curé de cette paroisse et accompagner son évêque dans ses tournées de confirmation. C'est alors que son charisme de prédicateur prend de l’élan et qu'il se gagne l’estime et l'admiration de tous. On le demande comme prédicateur de missions paroissiales partout dans cette région.

Mais la demande la plus importante lui viendra alors du fondateur de sa congrégation religieuse. C'est ce dernier, le Père Moreau, qui lui demande en mars 1863 de se rendre ici, à Memramcook, pour remplacer l’abbé F. X. Lafrance à la cure de la paroisse Saint-Thomas et surtout, également, pour relever le séminaire Saint-Thomas, fondé par Lafrance en 1852 et qui a dû fermer en 1862 pour manque de moyens financiers. Heureux de cette nomination, Lefebvre accepte volontiers et arrive à Memramcook le 7 juin 1864.

Une fois sur place, il s’empresse de mettre tant bien que mal les vieux bâtiments de l'abbé Lafrance en état de fonctionner pour l’automne de la même année. Les ouvriers de la première heure, au nombre de sept, 3 prêtres et 3 frères, en plus du Père Lefebvre, reçoivent leurs premiers étudiants le 10 octobre 1864. Au grand total, ces derniers sont au nombre de 31, « prémices de cette humble fondation destinée à régénérer tout un peuple ». « Le siècle de silence » des Acadiens tirait à sa fin. En 1865-66, il seront 69 étudiants et en 1875-76, le nombre atteindra 200.

Le Collège Saint-Joseph, tel est le nom qu'on lui donne, acceptera les anglophones aussi bien que les francophones et connaîtra un essor rapide en même temps qu'apparaissent en Acadie d'autres instruments d'affirmation d'identité, tels que journaux, congrès nationaux, etc... Camille Lefebvre suscite la fierté des Acadiens sans irriter l'hostilité des nationalités environnantes. Quatre ans seulement après sa fondation, le collège se voyait octroyer une charte et une subvention annuelle du gouvernement provincial.

Dans sa communauté religieuse, on reconnaît ses talents. On le nomme supérieur provincial avec siège à Montréal en 1871. Il n'accepte ce poste qu'en 1872 et à la seule condition de demeurer à la direction de son collège à Memramcook. En raison de son dévouement envers sa communauté et les catholiques des Maritimes, Rome lui décerne en 1876 le litre de missionnaire apostolique.

À la paroisse Saint-Thomas, le père Lefebvre se révèle éloquent prédicateur aussi bien qu’habile administrateur. Aidé de ses confrères de Sainte-Croix, il s’occupe du ministère de la paroisse qui s’étale encore sur un territoire dépassant les bornes de la vallée de Memramcook. C’est lui qui, en 1879, fait démolir le vieux clocher de l’église de pierre pour le remplacer par une tour de pierre surmontée d’une flèche supportant une croix, tel qu’existant encore aujourd’hui.

Des célébrations inoubliables marquent ses 25 ans de sacerdoce en 1880, la première convention nationale des Acadiens en 1881 ainsi que le 25e anniversaire du collège en 1889. En 1894, l'Université Laval relève ses mérites en lui décernant un doctorat honorifique « en raison des services rendus à la cause Acadienne Française dans le Nouveau-Brunswick et comme ayant été professeur de théologie pendant douze ans ». On reconnaît ainsi son rôle d'enseignant orthodoxe autant parmi ses élèves que devant bien d'autres assemblées. Les comptes rendus des congrès nationaux démontrent bien qu'il a toujours gardé l’éloquence enflammée des premières années.

Paroissiens, religieux, étudiants et la population acadienne en général sont attristés par sa mort en 1895. À cette occasion, on a dit: « Nous venons de faire une perte nationale et toute l'Acadie est dans un grand deuil…cet homme plus que tout autre a été notre bienfaiteur. Il est le nouveau Moïse qui nous a délivrés du servage de l'ignorance. »

Son oeuvre s'est prolongée au delà de la mort, puisque son modeste collège est devenu université. Dans la deuxième partie du 20e siècle, cette institution prend un essor inespéré: les effectifs sont transférés plus au nord pour devenir, à compter de 1963, 1'Université de Moncton. Trois ans plus tard, le collège du Père Lefebvre ferme ses portes après avoir dispensé l'éducation supérieure pendant 102 ans, permettant ainsi au peuple acadien de prendre sa juste place sur la scène universitaire de notre pays.

Hommage à celui qui donna aux Acadiens un espoir en un avenir bien à eux.